Galerie Séquence

Les 20 ans de Séquence
août 2003

par Denise Pelletier

(DP) - Curieusement, cette année, beaucoup d’artistes et d’organismes culturels du Saguenay-Lac-Saint-Jean célèbrent leurs 20 ans de carrière ou d’existence. C’est sans doute un signe que l’année 1983 a été particulièrement effervescente dans le domaine de la création. Parmi ces «vingtenaires», Séquence, centre d’artistes qui marque cet anniversaire par une multitude d’événements et de manifestations qui, sous le titre de Trafic’art, durent un mois et demi, jusqu’au 5 octobre.
Gilles Sénéchal, un des fondateurs de Séquence, dont il assume la direction artistique depuis 20 ans, et Lucien Frenette, directeur administratif et associé à Séquence depuis 1985, ont bien voulu nous raconter l’histoire de ce lieu, à la fois galerie, centre de diffusion et de production en art actuel et organisme de soutien aux artistes et à la création.
A l’origine, dans les années 70, un collectif d’artistes de la région s’est formé pour présenter expositions et activités à la maison du Cran, sur la rue Jean-Allard à Jonquière, et a pris le nom de Galerie de l’Arche. Parmi eux, entre autres, Richard Langevin, aujourd’hui conjoint et gérant de Diane Dufresne, qui était alors étudiant au Cégep de Jonquière. Autour de lui, Carol Proulx, Michel Gauthier, Carole Gauthier.
C’était l’époque des premiers collectifs, des rassemblements d’artistes qui prenaient forme un peu partout au Québec. La Galerie de l’Arche a été l’un des premiers centres multidisciplinaires, présentant des activités en musique, poésie, cinéma. Ainsi, le réalisateur Alain Corneau a produit un film sur le symposium international d’art environnemental.
Toutefois, 50% des expositions présentées par la galerie de l’Arche étaient en photographie. Le groupe a donc décidé, pour ainsi dire, de développer la photo, de mettre davantage l’accent sur ce médium qui était la haute technologie de l’époque, souligne Gilles Sénéchal. Il fut donc décidé qu’il y aurait changement de nom et d’orientation, et après mûre réflexion, on a opté pour la galerie Séquence, qui est d’ailleurs toujours le nom officiel du centre. La première exposition fut présentée au CNE en 1983, sous le titre Communiqu’art. On y trouvait entre autres des oeuvres des photographes Gilles Sénéchal, Michel Gauthier, Marcel Cloutier, Paul Cimon. Pendant la première année, Séquence a occupé la petite galerie située dans le hall du Centre national d’exposition, pour ensuite déménager au coin St-Dominique et Jean Allard.
A cette époque, une nouvelle tendance est venue s’ajouter à la tradition socio-documentaire de la photographie: celle de la recherche esthétique et visuelle, et Séquence faisait place aux deux types de pratique, rappelle Gilles Sénéchal. En 1987, Séquence organisait le colloque «Marques et contrastes», autour d’une exposition collective qui réunissait à l’Université du Québec à Chicoutimi une douzaine d’artistes photographes parmi les plus actifs de l’époque. Séquence a par la suite publié les actes de ce colloque, l’un des premiers du genre à se tenir au Canada, et qui fut suivi par de nombreux autres.

Déménagement
Puis en 1988, Séquence quittait Jonquière pour s’installer à Chicoutimi, avenue du Séminaire, au troisième étage de l’ancienne école St-François Xavier. Un très gros changement de lieu, marqué aussi par l’élargissement de la mission, notamment l’intégration à la programmation de la vidéo d’art, qui en était alors à ses premiers balbutiements. Parmi les premiers vidéastes exposants, le Jeannois François Girard, aujourd’hui connu internationalement pour son film «Le Violon rouge».
Ce fut une période d’éclatement de la multidisciplinarité, alors que sculpture, peinture, installation, performance se greffaient à la photographie pour explorer diverses avenues de création.
Malgré la difficulté de faire connaître l’art actuel, et même si, à cause de son emplacement, la galerie était peu accessible au grand public, les gens de Séquence persévéraient, «et les artistes venaient à nous car ils voulaient être diffusés», rappelle Gilles Sénéchal. Quelques expositions à caractère ludique, requérant la participation du public, soulevèrent beaucoup d’intérêt, notamment «Portraitisés», en 1990, où on avait demandé à des personnalités connues de concevoir une présentation pour leur propre photographie.
A cette époque aussi, Séquence a développé d’autres formes de collaboration avec les artistes, assurant par exemple un lien entre eux et la Banque d’oeuvres d’art du conseil des arts du Canada: c’est ainsi que cette dernière, sur la recommandation de Séquence, a acquis le Tapis stressé, de Jean-Jules Soucy, et des oeuvres de quelques autres artistes de la région. Plusieurs projets ont aussi été élaborés en collaboration avec les professeurs et créateurs de l’Université du Québec à Chicoutimi, souligne Lucien Frenette.

Rue Racine
Puis ce fut encore un déménagement, en 1997, dans l’immeuble du 132 Racine est, que la Ville (Chicoutimi) avait acquis et vendu pour un montant symbolique de 1$ à la galerie, qui doit en assurer la gestion et l’aménagement. Désormais plus proche des gens, plus intégrée au tissu urbain, Séquence poursuit sa mission de diffusion de l’art et de soutien aux artistes. Certaines expositions attirent davantage l’attention comme Fauna Secreta, des artistes catalans Joan Fontcuberta et Pere Formiguera, qui a attiré près de 8000 personnes à l’été 1999: un record de fréquentation pour Séquence, dont le but principal n’est pas d’attirer les foules, précise cependant Lucien Frenette.