Jérôme Légaré

Fidèle à l'aquarelle
septembre 1995 (l'artiste est décédé en 1999)
 
par Denise Pelletier

CHICOUTIMI (DP) - Le frère Jérôme Légaré fait encore un peu de peinture et il se porte plutôt bien, il a d'ailleurs célébré ses 86 ans hier. Il a dû cependant quitter la région il y a six mois pour des raisons de santé, ainsi qu'il nous l'a fort gentiment expliqué lorsque nous l'avons joint par téléphone à la résidence des Frères Maristes de Château-Richer, près de Québec, afin de pouvoir renseigner les amateurs d'art de la région qui se demandaient ce qu'il était devenu.
«J'étais atteint de psoriasis, une maladie de peau, et comme mon état est devenu assez sérieux, on m'a proposé d'aller me faire soigner à l'infirmerie des frères Maristes (il est membre de cette communauté). Je n'avais pour ainsi dire pas le choix, et en fait j'ai été si bien traité que la maladie est maintenant contrôlée», dit-il. Il ne pense cependant pas revenir s'installer dans la région, dont il se souvient cependant avec plaisir, car c'est ici qu'il a commencé une carrière d'aquarelliste qui devait s'avérer prolifique et lui apporter la reconnaissance du public.
Il se souvient de sa première exposition, à Arvida en 1971. «C'est une amie, Claire Frève, qui me disait depuis longtemps que je devrais exposer. Un jour je me suis décidé et j'ai réuni une soixantaine de mes oeuvres, des aquarelles et des huiles, pour les montrer au public». Cette première exposition a été suivie de plusieurs autres, dont la plus importante s'est déroulée en 1972 dans le hall de l'auditorium Dufour, sous l'égide de la Société des Arts. Ce fut un énorme succès, un concert d'éloges dans les journaux: «Les gens me reconnaissaient et venaient me parler dans les endroits publics», dit le frère Jérôme Légaré, qui devenait ainsi à sa manière une sorte de vedette. Par la suite, il s'est fait connaître dans la région et à l'extérieur: les collectionneurs ont été séduits apprécient par ses paysages à l'aquarelle réalisés dans un style qui l'on a qualifié d'impressionnisme.
Si sa carrière publique d'artiste peintre commençait assez tard (il avait alors 62 ans), l'art et la peinture l'intéressaient depuis toujours et occupaient l'autre partie de sa vie professionnelle, l'enseignement. Né à Chicoutimi, Jérôme Légaré a quitté la région dès l'âge de deux ans, lorsque ses parents ont déménagé à Rimouski. Il est revenu à Chicoutimi en 1960, à la demande de son supérieur, pour y fonder avec d'autres frères Maristes l'école Dominique-Racine, où il a enseigné les arts à des milliers d'élèves.
Surtout identifié à la technique de l'aquarelle, Jérôme Légaré a eu de nombreux contacts avec des aquarellistes de la région et de l'extérieur. «La région du Saguenay-Lac-Saint-Jean était considérée comme une pépinière d'aquarellistes, et elle l'est toujours je crois», dit-il. Diplômé de l'Ecole des Beaux-Arts de Montréal, il s'intéresse aussi à d'autres techniques, comme la sculpture, pour laquelle il a fait une maîtrise à Washington. «J'ai fait beaucoup de sculpture sur pierre et sur bois, j'ai encore tous mes outils d'ailleurs, mais ici, c'est difficile parce que je n'ai pas l'installation qu'il faut, et que j'ai moins de force physique», souligne-t-il. Il aura eu le temps toutefois de réaliser plusieurs sculptures à caractère religieux pour sa communauté.
Son amour des arts est une affaire de famille, Jérôme Légaré en est certain. Il est d'abord un arrière-petit-fils du célèbre peintre Joseph Légaré. «Mon père me parlait très souvent de son grand-père, et il était lui-même créateur à sa manière, puisqu'il a eu longtemps un studio de photographie à Chicoutimi. Il avait d'ailleurs en sa possession une toile de Joseph Légaré, qui a malheureusement été détruite lors d'un incendie». Il ajoute que tout le monde dans sa famille est très attiré par la création et les arts visuels. Un de ses frères s'est orienté vers la peinture après avoir fait carrière dans le journalisme.
D'ailleurs Jérôme Légaré continue à peindre: «pour mon plaisir seulement, je n'essaie pas de vendre mes toiles», précise-t-il. Ce qui ne l'a pas empêché de participer, lorsqu'il y a été invité, à une exposition de groupe qui se déroulait tout récemment à Château-Richer.