À Londres
Le sculpteur se fait voler la vedette par la famille royale
septembre 1994
par Denise Pelletier
CHICOUTIMI (DP) - Pierre Granche a eu l'occasion de faire des expositions et installations un peu partout au Québec et à l'extérieur. L'une de ses plus importantes réalisations est la sculpture qu'il a érigée à Londres, pour souligner la participation d'un million de soldats canadiens aux deux Guerres Mondiales. Il a été choisi parmi cinq sculpteurs canadiens qui, après une sélection préliminaire, avaient été invités à soumettre une maquette.
Il a, dit-il, travaillé en accord avec l'environnement qui devait accueillir l'oeuvre, soit Green Park, un très beau parc près de Buckingham Palace. (Si la sculpture a été installée à cet endroit malgré la réticence des fonctionnaires britanniques, c'est grâce à l'appui de la Reine et de la Reine Mère, qui répondaient ainsi à une demande directe du patron de presse Conrad Black, nous apprenait récemment le magazine Maclean's).
«Ma sculpture occupe une grande surface sur le sol, mais elle ne va pas en hauteur, car je ne voulais pas faire concurrence aux grands platanes du parc», explique-t-il. Entre autres éléments de cette sculpture, un plan incliné de granit, sur lequel un mince rideau d'eau coule sans cesse, récupéré par un système complexe et sophistiqué de tuyaux. Il y a des feuilles de bronze incrustées dans la pierre: «les vraies feuilles qui tombent des arbres viennent les recouvrir ou se poser tout près, ce qui crée un effet d'harmonie», précise Pierre Granche. C'est la Canadian Memorial Foundation qui a fait faire cette sculpture.
Lors de l'inauguration, à laquelle il assistait le 3 juin dernier, Pierre Granche s'est littéralement fait voler la vedette par la famille royale d'Angleterre. Il y avait là la Reine et Lady Diana. Celle-ci, toute de mauve vêtue, était accompagnée par un homme. Photographes et caméramen n'en ont eu que pour la Reine et son ex-belle-fille, les mitraillant sans cesse pendant toute la cérémonie. Bien entendu, il ne fut question que des relations tendues entre les deux femmes, et de Lady Di et de son mystérieux compagnon, aussi bien aux nouvelles télévisées que dans toute la presse britannique du lendemain. De la cérémonie, de la raison d'être de ce monument et ... du sculpteur, il ne fut pratiquement pas question, explique Pierre Granche. Mais il n'en veut pas trop à Lady Diana. «Peut-être qu'un jour, un média va finalement parler de ma sculpture», dit-il avec un sourire amusé.
En 1980, Pierre Granche, invité au Symposium de Chicoutimi, avait installé une oeuvre à la Pulperie: sur des piliers carrés destinés à recevoir des pylônes (qui finalement n'y ont jamais été mis en place), il a placé une pyramide tronquée en béton. Installée dans un décor naturel et dans la végétation, la construction prend l'allure d'un lieu où on se repose, d'un bivouac, d'un temple, selon le sculpteur. Souvent, les jeunes y font des feux, de sorte que la pierre est toute noire. «Je vais de temps en temps la voir, elle est en train de devenir vestige archéologique, et c'est exactement le but que je cherchais», explique l'artiste.
Dans le cadre de la politique d'intégration à l'architecture, Pierre Granche, qui est aussi professeur à l'Université de Montréal, a créé la sculpture extérieure du Pavillon de Sèvres de l'Université Laval. Récemment, il a aussi créé, en vue d'expositions spécifiques, des oeuvres dans un parc public de Toronto et au Musée du Québec.