Ludique, pédagogique et communautaire
mai 1999
Denise Pelletier
LA BAIE(DP) - Comme cela se produit souvent en création, c'est à la fois la volonté et le hasard qui ont conduit Jean-Jules Soucy à devenir un artiste. Sans doute que l'esprit critique, l'humour, l'ironie, le sens de la formule percutante, la profondeur de la pensée, lui sont venus à la naissance ou dans sa jeunesse. Mais il se dirigeait plutôt vers l'enseignement des arts, après avoir obtenu son bac de l'UQAC.
Il a effectivement enseigné, d'abord sur la Côte-Nord, puis comme chargé de cours à l'UQAC. Quand les chargés de cours ont formé un syndicat, sa tâche d'enseignement a progressivement diminué parce qu'il avait moins d'ancienneté que les autres. Il s'est donc orienté vers du travail personnel, et depuis, il a toujours réalisé des oeuvres percutantes, qui, sous des dehors joyeux et amusants, suscitent de vraies questions sur l'art, la société, l'environnement. Comme ce «Vol de canards», où les visiteurs étaient invités à «voler» un des innombrables canards de papier qu'il avait fabriqués. Les titres de ses oeuvres et installations sont toujours amusants et ludiques, par exemple «Les grandes moppes canadiennes», «Soucy financier», «Le Festival de cannes», «Biodâme».
Son oeuvre la plus connue est sans doute le «Tapis stressé», fabriqué à partir de milliers de contenants en carton. D'abord montrée au Musée du Fjord, la pièce fut ensuite présentée près du Palais municipal à La Baie, puis, remaniée et intitulée «L'Oeuvre pinte», au musée d'art contemporain de Montréal.
Souc(y) pédagogique
Jean-Jules Soucy se préoccupe toujours de l'aspect communautaire et pédagogique de ses créations: il s'agit là peut-être peut-être d'un «souci» hérité de ses années d'enseignement. Dans le cas de la Restauration des Ha!Ha!, un comité pédagogique a réalisé un imposant cahier d'exercices de mathématiques et de français inspirés par les différents aspects du Monument Art de l'An 2000, pour les élèves de niveau primaire, secondaire et collégial, ce qui réjouit beaucoup l'artiste.
Actuellement, par ailleurs, les visiteurs et les écoliers défilent chaque jour dans son atelier: on leur prodigue des explications et on leur présente un court vidéo sur l'oeuvre en cours d'élaboration. Enfin, toujours dans la veine pédagogique et communautaire, Jean-Jules Soucy a demandé à plusieurs personnes de son entourage, et à d'autres choisies au hasard, de «colorier» à leur goût des motifs hexagonaux, ce qui produit des ensembles décoratifs très variés, dans lesquels on peut distinguer des formes géométriques, végétales, animales ou autres.
Soutien financier
Jean-Jules Soucy a toujours obtenu le soutien de sa communauté pour ses projets. Dans le cas du Monument Art, ce soutien est tout à fait extraordinaire, qu'il vienne de la communauté baieriveraine, des citoyens et des entreprises du Saguenay ou des gouvernements. Ainsi, la Corporation de la Restauration des Ha!Ha! accomplit un travail colossal de recherche de soutien financier et de travaux en tous genres, nous dit son président Michel Bouchard.
L'échéancier prévu à l'origine a été quelque peu modifié: le premier élément mis en place sera l'immense pyramide d'aluminium formée par des panneaux réfléchissants de type «cédez». La construction a été confiée à la firme CLD Construction de Jonquière, et les fondations de la pyramide, en béton, seront probablement coulées au cours de l'été qui vient.
Progressivement au cours de l'automne, les éléments de la structure principale seront mis en place. On offre toujours au public d'acheter les pointes d'humour la constituant, afin d'avoir leur nom inscrit sur l'oeuvre. L'objectif de vendre 12 500 de ces 30 000 pointes, d'ici au tirage du 11 juin, sera sûrement atteint, sinon dépassé, affirme Michel Bouchard.
Par ailleurs, des commanditaires majeurs de la région, comme Alcan et Abitibi Consol, ont accepté de contribuer au projet, les gouvernements ont accordé des subventions, d'autres demandes ont été faites et les entreprises de l'extérieur de la région sont actuellement sollicitées, précise Michel Bouchard. Le coût total du projet est évalué à 2.5 millions.
Lors de la première fête d'inauguration, qui soulignera le passage à l'an 2000 le 31 décembre 1999, c'est donc la pyramide qui sera visible et terminée, et les travaux d'aménagement du lit de la rivière Ha!Ha! commenceront au printemps de l'an 2000 pour être terminés en 2001.